samedi 6 mars 2010

Chapitre 10 : Nuits de Bruges



J'ai eu l'occasion de me rendre dans la formidable ville de Bruges à plusieurs reprises dont un week-end passé sur place.
Il y à quelques semaines grâce à des amis j'ai pu y retourner, enfin devrais-je rajouter !


Après une matinée consacrée au shopping (entendez par là, écumer les chocolateries de la ville !) puis un repas dans un petit restaurant fort sympathique et avec une superbe vue, enfin arriva le moment que j'attendais depuis mon arrivée, bien que la compagnie de mes amis ne fut pas désagréable, loin de là.
Comme mes compagnons de voyage formaient trois couples et étant le seul célibataire, je les laissais donc pour leur petite visite romantico-amoureuse et je m'éclipsais à la reconquête de ma ville.....


Après avoir pris congé de mes amis, je lève les yeux vers le ciel menaçant mais pourtant fort prometteur.
Aujourd'hui il est couvert et le temps venteux, comme si Bruges s'attendait à ma visite m'offrant des conditions idéales pour parcourir ces petites ruelles, sa grande place ou encore ces très nombreux petits ponts surplombant les canaux sinueux irriguant la ville comme de nombreuses petites veines...

Connaissant la ville, enfin le pensais-je, je me dirigeais vers le Beffroi pour profiter de l'impressionnante vue qui nous est offerte à son sommet après une ascension de presque 30 minutes par des escaliers se rétrécissant considérablement à l'approche du sommet.

Mais l'effort n'est pas vain, croyez-moi...

Après avoir longuement regardé le magnifique diaporama qui s'offre sous mes yeux, bien que cherchant désespérément l'océan, la Mer du Nord proche cousine de mon Atlantique tant aimé, mais que les nuages bas, d'un gris sombre et profond, annonciateur de quelques averses imminentes, me cachent, je redescends, mais avec une idée en tête : me rendre au bord de l'immensité maritime que depuis trop longtemps je n'avais pas eu l'occasion de saluer.

Parcourant les ruelles d'un pas tranquille, je croise de superbes habitations flamboyantes ou très modestes mais dégageant toutes cette impression, que le temps c'était à jamais figé dans la cité flamande et qu'au détours d'un quelconque coin de rue, des nobles ou des chevaliers en armes pouvaient surgir à tout instant.
Bruges, ville aux passé radieux et au présent envoûtant par son architecture et sa quiétude toute relative mais qui d'une façon simple et directe parle à mon cœur, enlace mon âme de nombreuses émotions et sensations qui me font sourire les larmes aux yeux.


Ici le mot mélancolie prend tout son sens, le romantisme n'est pas qu'une simple invention due à un poète maudit, mais se retrouve là où notre
regard s'attarde.
Ville si proche de moi et dont chaque partie de mon être semble reconnaître comme une amie, une confidente et une maîtresse.

Bruges, ville des amants solitaires et silencieux, où les mots sont inutiles, seuls les regards et les soupirs peuvent contenir l'intensité des émotions s'élevant de chaque pierre, arbre ou canal de la cité.


Je prend une navette de bus m'emmenant vers mon rendez-vous au bord de cette plage où déjà il me semble entendre mon ami l'océan.
A peine arrivé, j'ose enfin fixer l'immensité grondante et écumante de cette mer, dont la similitude avec mon Atlantique est frappante.

Aucun doute sur leur lien de parenté.

Sous cette chape nuageuse de plus en plus menaçante, rares sont les âmes égarées promenant leur corps maladroit sur la plage.


Après avoir parcouru la plage au sable collant, où de jeunes vagues téméraires viennent à s'échouer, je m'assois sur un rocher face à cet horizon dont les lignes incertaines m'apaisent et pourtant font monter en moi une profonde mélancolie.

Tant d'années sans pouvoir partager un tel instant, sentir cet air frais et particulier lécher mon visage fatigué , laisser ce vent fougueux et caressant jouer dans mes cheveux, tant d'années avant de me sentir entier, recevant les lames d'écumes sur les rivages de mon âme solitaire et affamée, que cet instant précieux se grave lentement mais avec une précision d'orfèvre dans mon cœur cimetière.


Se sentir un peu plus seul, s'approcher un peu de la vérité et laisser mon âme s'envoler vers la voûte nuageuse, vers cet au-delà où encore je peux rêver, juste là où les larmes puisent leur beauté et leur sincérité.
Juste cet endroit connu mais au chemin sinueux et escarpé où dans le regard de l'autre j'existe, quand ma vie recouvre une valeur céleste, une puissance tempétueuse, où je suis enfin aimé...
Rester encore un peu enlacé par cet embrun qui me caresse comme une amie, comme une amante et qui reconnaît en moi un enfant égaré sur le sol rocailleux où se brisent inexorablement le moindre espoir, la moindre folie.

Enfant océan, cloué au sol dans l'immobilisme du bitume au goût de mort, engluant un peu plus mon âme, recouvrant d'un épais voile mon cœur bohème.

Elle était là ma vie, dansant au milieu des vagues folles, riant à perdre haleine avec ces mouettes joueuses, construisant inlassablement ces château de plume dans le sable d'or de dame Océane, juste là devant mes yeux clos par le désir de simplement trouver l'autre, l'autre...

Mais il n'y a là que cette fille aux cheveux noir qui passe devant moi, m'offrant un sourire amical, comme si elle aussi connaissait la valeur de ce moment, venant me délivrer de cette vision où déjà j'allais me noyer.
Je la regarde s'éloigner, image d'un amour fuyant, d'un avenir illusoire mais encore hantant mes rêves les plus intimes, constatant avec étonnement que la lumière du jour s'estompe déjà et qu'il me faut rejoindre la ville.

Je me dirige vers l'arrêt de bus et juste à temps je réussi à monter, non sans un dernier regard vers cette amie océane, si chère à mon âme, mais trop rarement présente dans ma vie, quand les nuits se font glaciales, gerçant un peu plus mon cœur et imprimant sur mon visage ces traces sous mes yeux rougis par cette maîtresse sans pitié, dame insomnie.


Je repars vers la cité où la nuit vient de se poser sans le moindre bruit, avec cette lancinante sensation que plus jamais une tel moment ne viendra croiser la longue route de ma destinée.

La ville semble s'éveiller lentement et de la pénombre parcourant ces ruelles, les lumières jaillissent, bien que artificielles, redessinant les contours incertains des maisons et de ces somptueux monuments, leur redonnant une nouvelle vie, flamboyante et empreinte d'une magie réelle.

Nuits de Bruges où seul le désir et la passion semblent pouvoir atteindre l'aube brumeuse, quand les baisers de ces amants silencieux délivreront leur lèvres avides et leurs bouches ardentes, les laissant s'éloigner dans un ultime soupir, un dernier regard troublé.
Nuits de solitude où l'espace entre mes bras se referme sur le néant, où mon regard éperdu vient s'écraser sur les dures briquent de ces murs ancestraux, sans que rien, ni personne, ne vienne l'intercepter, le recueillir, lui donner sa vraie valeur miroir.


Je rejoins mes amis déjà attablés, conversant joyeusement et ravis de me revoir.
Je m'assois, tentant de cacher ces émotions qui ruisselles sur mon âme rocher où seul l'écume du souvenir de mon océan atteste de mon aventure dans ma belle cité de Bruges.

Après avoir fini la soirée dans un bar, je vais déjà devoir quitter cette ville maison, cet endroit refuge pour reprendre cette route d'asphalte longue et blessante, qui au matin blême et insensible me mènera dans mon grand lit vide et froid.

Là je continuerais de revivre cette journée magnifique, entre rêve et réalité, où peut-être cette fille du rivage me dira juste quelques mots qui changeront ma vie, des mots qui semblaient danser au fond de son regard, sombre comme ce ciel menaçant et d'une intensité attirante comme l'océan, mon océan.

1 commentaire:

  1. comme tu écris bien
    te l'ai-je suffisamment dit?
    "....gerçant un peu plus mon cœur et imprimant sur mon visage ces traces sous mes yeux rougis par cette maîtresse sans pitié, dame insomnie."
    c magique
    du coup tu me fais aimer Bruges tu me fais rêver de cette ville ancestrale

    pourquoi as-tu coupé les ponts avec l'écriture mais bon l'artiste va et reviens au rythme de tes insomnies,je saurai attendre!

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